C’est avec stupéfaction que l’ASPAS a pris connaissance d’un e-mail, daté du 20 janvier 2020, envoyé par la DDTM 76* à un éventail de personnes de Seine-Maritime, les invitant à déclarer via un formulaire en ligne des « dégâts et atteintes causés par le renard. »
Dans ce courriel, on peut notamment lire que “les risques sanitaires et la prédation de cette espèce sur la petite faune sauvage et les élevages amateurs de volailles sont jugés importants”… !!!
“Sur la petite faune sauvage” a même été écrit en gras… Quelle incroyable découverte : oui les renards sont des carnivores qui mangent d’autres animaux, tout comme un lièvre mange de l’herbe et des pissenlits !
Quant aux risques sanitaires, aussi en gras (sous-entendu : les renards sont tous porteurs de maladies…), des études montrent qu’ils sont en réalité amplifiés par la chasse et le piégeage** ! Le renard est un charognard : il participe à l’élimination des animaux malades et des cadavres, évitant ainsi la propagation d’épidémies. De plus, il freine l’expansion de la maladie de Lyme*** en chassant les rongeurs, qui transportent les tiques vectrices de cette maladie.
Le rôle d’un Préfet est de répondre à une nécessité émanent directement des citoyens, PAS de chercher de façon proactive des excuses pour abattre des animaux sauvages !
Car telle est bien la motivation : encourager un maximum de personnes à témoigner en défaveur des renards, dans le but de disposer de suffisamment de “preuves” pour justifier l’adoption éventuelle d’un nouvel arrêté de destruction de cette espèce dans ce département…
Les renards, de par leur statut ESOD**** sont déjà chassables et piégeables TOUTE l’année. Mais pour certains cela ne suffit pas : il leur faut aussi des battues administratives ou des opérations de tirs de nuit, pour persécuter encore plus une espèce dont le rôle sanitaire et écologique pour les humains est pourtant largement documenté par la science !
Que des Fédérations de chasse fassent de telles pressions pour recueillir des déclarations de dégâts auprès d’agriculteurs, c’est bien connu, mais à notre connaissance, jamais une Préfecture !
Rappelons que l’ASPAS, aux côtés d’AVES de la LPO Normandie et du GMN a fait condamner le Préfet en obtenant, le 4 septembre 2020 la suspension de l’arrêté qui autorisait les lieutenants de louveterie à massacrer, par tir, jusqu’à 1430 renards à travers tout le département entre le 15 juillet et le 31 décembre 2020, de jour comme de nuit.
Cette puissante victoire inter-associative a aussi été rendue possible par une formidable mobilisation de la société civile et des médias. Un front citoyen qui, visiblement, a piqué la Préfecture 76 et ses chasseurs infiltrés aux postes-clés, visiblement pas prêts à changer de mentalité…
Vous habitez la Seine-Maritime et gérez un élevage familial / professionnel ?
L’ASPAS vous invite à lui faire parvenir vos déclarations de non dégâts. L’objectif : montrer que la cohabitation avec les renards est tout à fait possible… et même souhaitable !
Pour cela, nous tenons à votre disposition un modèle de courrier à adapter selon votre situation (téléchargeable ici), puis à transmettre à l’adresse delegation76@aspas-nature.org pour que nous puissions recenser les déclarations et aider à porter votre voix.
Pour une action encore plus efficace, nous vous proposons aussi de remplir un formulaire plus détaillé, avec la description de votre élevage, la qualité de votre protection, votre milieu d’habitation, accompagné de votre témoignage. En quelques minutes et grâce à ces preuves, vous pourrez ainsi aider les associations de protection de la nature à œuvrer en faveur d’une réhabilitation de Maitre Renard.
* DDTM : Direction départementale des territoires et de la mer.
** Comte S. et al., 2017. Echinococcus multilocularis management by fox culling: an inappropriate paradigm. Preventive Veterinary Medicine, 147: 178-185
*** Hofmeester T.R. et al., 2017. Cascading effects of predator activity on tick-borne disease risk. Proc. R. Soc. B, 284: 20170453
**** ESOD : “espèces susceptibles d’occasionner des dégâts”, terminologie administrative qui remplace celle des “nuisibles” depuis 2017