Communiqué interassociatif ASPAS, Férus, FNE, LPO, Humanité & Biodiversité et WWF
La dernière estimation du nombre de loups présents en France est connue depuis des semaines par les responsables gouvernementaux, qui se sont gardés de la rendre publique, et pour cause : elle fait état d’une baisse de la population de 9 %, passant de 1096 loups estimés pour l’année 2022 à 1003 individus pour 2023.
Cette information que nous révélons aujourd’hui est particulièrement préoccupante, alors que
le gouvernement a reconduit automatiquement le plafond annuel de loups dont la destruction
est autorisée (209 individus), et qu’il plaide toujours pour un déclassement du statut de
protection du loup au niveau européen
Les scientifiques du Muséum d’histoire naturelle ont produit en 2019 une note en réponse à
une saisine ministérielle, dans laquelle il était souligné que le niveau élevé de destructions
autorisées par l’Etat risquait concrètement d’entraîner une baisse de la population, mais le
gouvernement n’en a tenu aucun compte. Il n’existe par ailleurs aucune étude scientifique
récente sur la viabilité de la population de loups française, qui devrait pourtant être à la base
d’une position de demande de déclassement
Aujourd’hui, avec cette estimation qui concrétise ces alertes scientifiques, il est de la
responsabilité du gouvernement de baisser immédiatement le plafond de destructions
autorisables pour 2024 en tenant compte de cette nouvelle estimation et en modifiant la
« note technique » de la préfète coordonnatrice, et de cesser de prôner un déclassement du
niveau de protection de l’espèce, cette nouvelle estimation venant renforcer le constat qu’elle
n’est pas en bon état de conservation
Il y a 5 ans, l’Etat avait justifié l’augmentation du plafond annuel en affirmant : « la croissance
de la population de loups intervient dans un contexte marqué par un niveau de dommages aux
troupeaux qui se maintiennent à un niveau élevé […] et qu’il apparait aujourd’hui nécessaire
de temporiser la croissance de l’espèce afin de laisser le temps aux éleveurs de s’adapter à la
présence du loup ». Aujourd’hui, alors que le niveau des dommages est stabilisé depuis 2017
et qu’il a même baissé significativement en 2023 de 9 % selon les constats officiels de l’Etat,
cet argument ne tient plus et les choix du gouvernement pour ce qui concerne les autorisations
de destruction s’apparentent plus à une volonté d’empêcher l’installation de l’espèce sur de
nouveaux territoires qu’à une recherche de prévention des dommages aux troupeaux.
Concrètement, sur la période 2018-2021, le taux de survie des loups était de seulement 27 % dans les territoires où l’espèce arrive sans être installée durablement, contre 68 % dans les
territoires où elle est installée de plus longue date.
Cette orientation du gouvernement se traduit dans la multiplication des autorisations de tirs
de loups hors des conditions dérogatoires prévues par la loi (troupeaux non ou mal protégés,
dégâts localement faibles sur des tirs autorisés, nombre de loups détruits sans proportion avec
les dommages constatés puisque les arrêtés d’autorisation ne comportent pas de précisions
sur le nombre d’individus dont la destruction est autorisée,…)
Les organisations de protection de la nature qui ont suspendu depuis septembre 2023 leur
participation au Groupe National Loup, voient malheureusement confirmer leur analyse que
le gouvernement se moque de cette instance de « dialogue » et gère le dossier de façon
politicienne : opacité dans la transmission des données, définition d’objectifs pour le Plan
National Loup ne reposant pas sur des données scientifiques, facilitation réglementaire des
tirs alors même que les dommages sont déjà en baisse
Nos organisations demandent à l’Etat de changer sans délai les orientations de gestion de la
présence du loup dans notre pays et de fonder ses choix, ainsi qu’il le prône lui-même
régulièrement, sur des données et analyses scientifiques et le respect du droit, c’est à dire la
poursuite de l’objectif d’atteinte du bon état de conservation pour la population de loups
dans notre pays.
Contact presse ASPAS : presse@aspas-nature.org / 06 10 27 44 23
Photo d’en-tête © Daniel Benfares